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Hendaye - Banyuls, la grande traversée, par Gérard Filoche.

2e partie : Gabas - Les Granges d'Astau
    16 - Gabas, 1067 m – Gourette, 1346 m
Extraits du livre.

Dénivelé +1438 m. Dénivelé –1119 m. 24 km

Le calvaire... ...Nous partons à 7 h et non à 6 h 30 comme prévu, il faut s'adapter aux préparatifs. Il fait beau et la journée s'annonce chaude...très chaude, très très chaude. Nous vivrons sur les provisions du voyage agrémenté de pain du petit déjeuner. Cette première journée a la particularité d'être l'une des plus difficiles de la traversée intégrale. Autant par sa longueur : (24 km), par le temps de montée au col : (7 h) que par les risques de neige encore présents au sol au niveau de ce même col. C'est une étape obligée, sans possibilité d'hébergement en cours de route, sauf la tente, mais nous n'en avons pas. Ajoutons l'acclimatation, même si ce n'est pas le Tibet, car nous, pauvres citadins, avons toutes les pollutions à évacuer avant d'apprécier l'air pur des Pyrénées.

Bref, c'est une mise en jambes très difficile…

…La montée est régulière mais celle de la température est plus rapide. Il n'y a pas de vent et au soleil pour le moment, le thermomètre accroché à la bretelle du sac à dos de Francine indique déjà 35°. Il n'est que 11 h ! Nous débouchons sur le plateau surplombant la vallée du Soussouéou. Au loin, sur l'autre versant le petit train d'Artouste que nous avions pris l'année dernière, poursuit son chemin. Une pause pour reprendre souffle dans une large combe est bienvenue. Il n'y a plus d'ombre depuis longtemps. Je repars tout doucement, avant mes compagnons. Un parfum pénétrant et flatteur magnifie l'odeur de l'air, embaume l'espace surchauffé. La montée est de plus en plus difficile, la température atteint 40°. Et nous ne sommes pas au bout de nos peines !! Au détour du chemin, tout là haut, j'aperçois la Hourquette d'Arre, ses 2465 m et son énorme névé qui tapisse tout le vallon. Francine a également remarqué ce col sans se douter que nous allions là-haut !...

La Hourquette d'Arre …Les premiers névés font leur apparition. De dessous celui qui est en amont, un torrent plus qu'impétueux jaillit. Il faut bien le traverser, il ne fait que 5 ou 6 m de large, mais quel courant ! Nous descendons un peu son cours pour trouver un passage plus favorable, car à l'endroit où le chemin le traverse, c'est impossible. Après 10 mn de recherches, il semble qu'un endroit soit plus praticable, à priori ! Des pierres à peine plus longues que la chaussure, effleurent la surface. Prenant mes deux bâtons pour m'équilibrer, j'entame la traversée. Avec le sac et l'appareil photo, l'équilibre est précaire. Au beau milieu, l'un des rochers se dérobe. Ce n'est pas le ballet du Lac des Cygnes, mais la chorégraphie interprétée est digne de l'Opéra Garnier. Première pensée, sauver les sacs au cas où ! C'est le bâton de droite qui subira les dégâts du rétablissement imposé par le double axel inversé carpé glissé. Il est plié en deux, mais grâce à lui je suis au sec. De l'autre coté les regards de mes amis sont imprégnés de doutes…

…Nous nous arrêterons après avoir franchi un grand espace neigeux. La prudence est de mise surtout que les organismes commencent à accuser le coup. Il est 14 h 00. Le soleil est au zénith ; fait très chaud, pas d'ombre, pas de vent, pas faim, même pas envie de prendre une photo, c'est dire ! Cependant, il ne faut pas trop s'attarder. Il y a encore un ressaut avant le névé du col.

Que la force soit avec nous.

Ce ressaut n'est pas celui d'Hillary avant le sommet de l'Everest, mais replacé dans notre contexte, il en a visiblement le même goût amer.

Nous y arriverons à ce col, ce sera sans doute long et pénible, mais nous y arriverons. Enfin la fin du ressaut.

En levant les yeux, nous voyons qu'il ne reste plus " que " 200 m de dénivelé avant le sommet du col que l'ont devine tout là haut. Hormis le fait que ce soit pleine pente, le névé est là et bien là. Des traces zigzaguant dans son inclinaison sont visibles sur une grande partie. Il nous faudra être encore plus prudent. Un peu de pierrier pour commencer, puis très vite la neige, heureusement ramollie par cette chaleur. Les marques récentes ont de grandes enjambées, Francine m'en demande des plus courtes. La pente se redresse fortement et...les traces disparaissent. Je ne vois même plus les empreintes de pas de Gérard. Mystère !! En y regardant de plus près, je les trouve un peu plus à droite. Malgré la neige molle, d'une vingtaine de centimètres d'épaisseur, la glace n'est pas loin. Les bâtons rencontrent fréquemment sa surface dure et glissante. Nous redoublons de prudence.

Le col tout proche est maintenant bien visible. Gérard y fait même une apparition. Cela nous donne une échelle (pas pour monter) Les derniers zigzags dans la neige puis le rocher, et enfin le sommet de la Hourquette d'Arre à 2465 m. Il est quasiment 16 h 30, dur, dur. Voilà 9 h 30 que nous sommes partis. Pour une mise en jambe, c'est coriace, très coriace. Cette fois, je prends quand même quelques photos, en particulier celle du panneau indiquant le col et qui dans le soleil déclinant de cette chaude journée, forme sur le sol une croix ressemblant curieusement à notre...calvaire !

Arrivés enfin au refuge, à ma montre, il est 19 h 45 !... Voilà 12 h 45 que nous sommes partis de Gabas.

"Plein les bottes" sera le premier mot du jour !




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